• May 2023
  • Elsa Perez
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Les cas de greenwashing (et leur dénonciation) sont plus que jamais d’actualité en 2023. Mais que signifie réellement ce terme ? Quelles sont les pratiques à bannir et les bons réflexes à adopter pour s’en prémunir ?

La gouvernance des risques

Malgré la montée en puissance du reporting extra-financier, malgré la prise de conscience évidente des marques et entreprises, et probablement en raison de la vigilance croissante des consommateurs, les sanctions pour greenwashing ne cessent de croître. En 2019, 10% des plaintes adressées au jury de déontologie de la publicité français concernaient « l’éco blanchiment ». En 2021, leur part représentait 55% des plaintes. En France toujours, la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) a publié le 25 mai dernier un rapport sur une vaste opération de contrôle menée entre 2021 et 2022 : un quart des 1100 entreprises scrutées ont été épinglées pour des utilisations abusives ou trompeuses d’allégations environnementales.

Mais qu’appelle-t-on exactement le « greenwashing » ?

Il existe en effet plusieurs définitions du greenwashing. Certaines impliquent une pratique sciemment mensongère (« comportement impliquant une mauvaise communication délibérée sur les actions ou réalisations environnementales » ; mais d’autres, plus larges, intègrent également des communications qui sans être fausses peuvent induire les observateurs extérieurs (consommateurs, parties prenantes) en erreur. Le site e-marketing parle par exemple d’une « forme de communication abusive d’une marque, d’une société privée, d’un organisme public ou d’un individu, vantant – pas toujours avec une totale objectivité – les mérites de ses différentes actions menées dans l’esprit du respect de l’environnement ».

5 pratiques sont généralement pointées du doigt comme relevant du Greenwashing :

1. Détourner l’attention. L’entreprise vante une avancée environnementale mineure en passant sous silence des zones d’impact plus directes ; survalorise ses offres « vertes » alors même que celles-ci ne représentent qu’une faible part de son activité.
2. Manquer de transparence. L’entreprise utilise un vocabulaire peu clair, se prévaut de résultats relevant en fait d’une obligation réglementaire ou n’apporte pas les données nécessaires pour en vérifier la véracité.
3. Utiliser de faux labels ou certifications. La marque appose sur son produit ou ses communications un signe laissant penser que la solution est certifiée par un organisme indépendant alors qu’il n’en n’est rien.
4. Mentir délibérément ou par omission. C’est, par exemple, la marque qui va vanter un packaging 100% recyclé ou recyclable alors que seule une partie de l’emballage est réellement issu de matériaux recyclés ou que les filières de recyclage n’existent pas.
5. Créer un packaging trompeur. L’entreprise ou la marque utilise une sémiologie (couleur, typos, codes lexicaux, images) évoquant l’écologie et la nature alors même que son produit ne possède aucune vertu environnementale.

Si certaines de ces pratiques relèvent de la tromperie, on voit aussi qu’une communication maladroite ou peu mature peut elle aussi être qualifiée de greenwashing. C’est à ce dernier cas que nous nous sommes intéressés aujourd’hui pour proposer 4 bonnes pratiques de communication à mettre en place pour ne pas être taxé d’éco blanchiment.

Pratique 1 : définir clairement sa zone d’impact.

Deux exercices doivent normalement guider la communication extra-financière des entreprises : la cartographie des risques et la matrice de matérialité. Le premier définit les risques que les problèmes environnementaux font encourir à l’entreprise, mais aussi la menace que représente l’entreprise pour l’environnement. Le deuxième a pour but de croiser les attentes de l’entreprise et de ses parties prenantes pour déterminer les sujets sur lesquels l’organisation a un impact fort. Publiées par la quasi-totalité des sociétés, ces deux matrices ne sont pourtant presque pas utilisées pour déterminer les sujets majeurs de communication. Ce serait pourtant un excellent point de départ pour s’assurer que l’entreprise ne passe pas sous silence les sujets qui importent.

 

Pratique 2 : nouer un dialogue constructif avec ses parties prenantes.

Les sujets environnementaux sont suffisamment complexes pour que les entreprises aient besoin de s’appuyer sur des expertises externes pour construire leur stratégie. Il en va de même pour la communication. Comment savoir quels sont les labels les mieux reconnus, les indicateurs attendus des observateurs, les typologies de preuves recherchées et les manques constatés sans dialoguer avec ses consommateurs, les ONG, la société civile dans toute sa diversité ? Nouer ce dialogue constructif, dans lequel l’entreprise écoute et est écoutée, permet également de bâtir un réseau d’alliés précieux pour soutenir la voix de l’entreprise.

Pratique 3 : ne pas séparer narratif et reporting.

Que ce soit en raison des silos internes (les directions RSE produisent les données, les directions de la communication le narratif) ou des préjugés de communication (les experts veulent des chiffres, le « grand public » de belles histoires), les entreprises ont trop souvent tendance à déconnecter le reporting du narratif. Résultat : des histoires de progrès qui ne sont pas contextualisées et prouvées ou inversement, des données qui ne parviennent pas à raconter la démarche de l’entreprise et ses choix stratégiques. Les données extra-financières de l’entreprise devraient être un asset partagé par l’ensemble des communicants : pour les créateurs de contenu qui pourront ainsi appuyer leurs propos sur des chiffres contextualisés et certifiés, pour le marketing qui pourra diriger ses clients et consommateurs vers des informations de qualité, etc.

Pratique 4 : faire la pédagogie de sa trajectoire.

Pour éviter d’être taxées de greenwashing, beaucoup d’entreprises ont tendance à refuser de communiquer avant de disposer de suffisamment de preuves. Or expliciter sa trajectoire, en insistant sur les progrès à réaliser, en donnant des objectifs clairs et des échéances précises ne relève pas du greenwashing. Au contraire, cela permet d’identifier clairement les sujets sur lesquels se positionne l’entreprise, de poser les termes du débat avec ses parties prenantes (voir ci-dessus). Certes, cela oblige l’entreprise à apporter des preuves des actions mises en place pour atteindre ses objectifs. Mais là aussi, la transparence peut être un excellent allié des communicants : expliquer ses difficultés, dialoguer et interagir pour avancer… A l’image de ce que la plupart des entreprises font (réellement) à l’échelle stratégique.