• December 2024
  • Eric Camel
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3 pistes pour ne pas jeter le bébé avec l’eau du bain.

 

Je me demandais s’il n’était pas temps d’éviter de « jeter le bébé avec l’eau du bain ».

Le bébé étant ici la lutte contre le réchauffement climatique, désormais sujette à backlash.

Backlash qui touche tous les pans des politiques RSE, comme en témoignent notamment les atermoiements sur l’application de la CSRD, au nom de la défense de la compétitivité européenne …

Plus significatif encore :  la part des climatosceptiques dans les principaux baromètres d’opinion publique a doublé entre 2020 et aujourd’hui, tangentant les 40% de français.

Cette évolution menace les entreprises à deux titres :

  • parce qu’elles ont beaucoup investi dans la durabilité et une modification de trajectoire diminuera leur rentabilité (Cf. l’automobile et les ENR)
  • parce qu’elles peuvent s’exposer à un risque de réputation interne comme externe si elles se confrontent au mur du scepticisme ou à son envers, l’activisme.

Alors, comment doivent-elles s’y prendre ?

En s’adressant à la diversité des gens. Même si nous n’avons pas naturellement envie de parler avec certains d’entre eux…

Il faut en effet faire AVEC les vieux, les classes populaires, les moins diplômés et sans doute, les conservateurs. En clair, les populations parmi lesquelles le climatoscepticisme s’installe.

Ils sont le strict antonyme des « écologistes engagés » qui se recrutent principalement parmi les CSP + très diplômés, et qui ont une part de voix disproportionnée notamment sur Linkedin (ne jamais oublier à ce sujet que les bacs + 5 ne représentent que 15% d’une classe d’âge et que les « alters » ne figurent dans ce faible pourcentage qu’à hauteur de 40%…).

En clair, la cause de la lutte contre le changement climatique a besoin de nouveaux protocoles. Je vois pour cela 3 pistes :

1. Partir des besoins.

Et plus précisément des besoins présents (donc d’intérêts), vécus sur un mode individuel et montrer que le NetZero favorise leur satisfaction.

Ces besoins sont assez nombreux : l’alimentation et l’hydratation, la santé, la sécurité financière (le réchauffement est inflationniste !), la sécurité physique…

Pas sur le ton de la menace (on risque alors le refus d’obstacle) mais sur celui de la « conservation émancipatrice », celui qui résonne avec des valeurs égoïstes et la volonté commune d’être mieux ou moins mal dans le PRÉSENT.

L’hyperbole du futur tient à distance la majorité des gens. Pour les entreprises – très égoïstes, elles aussi — cela pourrait se traduire non pas en opposant les deux matérialités, financière et d’impact, mais en se focalisant sur leurs intersections et des résultats « à hauteur d’hommes ».

2. Partir des personnes.

Comme le disent fréquemment les associations, l’écologie a besoin de nouveaux locuteurs. Les pairs doivent être mobilisés. D’autant plus que le combat se mène désormais sur les réseaux sociaux.

Une marque aura toujours moins à dire, ou de manière plus segmentante, qu’un chef de Sodexo engagé dans la cuisine végétale, qu’un compagnon de Bouygues amoureux des constructions en bois ou qu’un pêcheur des Mousquetaires exposé à la chute des populations de poissons.

Comme le souligne l’excellente synthèse sur la « Climate Communications » de l’association Parlons Climat, « De nouvelles vagues de chaleur ont ravagé les côtes grecques » mobilisera infiniment moins que « J’ai perdu ma maison et tous mes biens dans les incendies »

3.     Partir des histoires.

Si vous avez les besoins et les personnes, reste donc à créer des histoires qui touchent les audiences. Cela sonne comme une évidence… Mais la cause de la lutte contre le réchauffement climatique en manque cruellement.

Elle scande en effet des acronymes – RSE, ESG, CSRD…- et un paquet de concepts : « neutralité carbone », « circularité », « matérialité ». Et de la data, beaucoup de datas (cf. CSRD).

Or, les audiences s’en tiennent éloignées. L’économie comportementalemontre en effet que les gens traitent les informations au prisme « d’histoires », ancrées dans leurs opinions et leurs valeurs. Il faut les comprendre, les accepter, pour que la lutte contre le changement climatique y trouve une place.

Au Royaume-Uni, des campagnes de promotion des transports collectifs visant des publics conservateurs ont ainsi rencontré un plus grand succès dès lors qu’elles mettaient en avant la protection des paysages.

Aux Etats-Unis, les Républicains sont plus sensibles aux enjeux climatiques quand le risque de guerre est pointé, bien plus que la submersion des côtes.

C’est ainsi.

Ne pas voir les publics comme des adversaires a priori, montrer de l’empathie, écrire avec talents : en somme, l’écologie a besoin de narratif.

Crédit : Éric Camel, CEO chez Angie